Quand on pense e-commerce on pense tout de suite à la vente de produits sur internet.
Aujourd’hui à l’ISEG Bordeaux, Mustapha El Hayani, intervenant professionnel, pose la question suivante à ses neuf étudiants de Master pro en Marketing : quel est le dernier achat e-commerce que vous avez effectué ? Les élèves répondent : “une coque de téléphone sur Amazon, des chaussures sur Zalando, des courses alimentaires”, etc. Bizarrement, aucun des élèves qui sont venus en train le matin même pour rejoindre l’école de commerce du quartier des Chartrons n’évoquent leur véritable dernier achat e-commerce : le billet de TER sur l’application SNCF !
L'exemple des "autocars Macron"
Car oui, on l’oublie souvent mais le e-commerce des services connaît une forte croissance ces dernières années et la mobilité aussi connaît sa révolution numérique et grâce au e-commerce, vous pouvez vous déplacer sans cesse avec de nouveaux services. Uber par exemple : imaginez ce même service sans réservation et paiement en ligne... De même pour les autocars dits “Macron” qui lorsqu’ils ont été lancés en 2015 n’étaient accessibles qu’avec une réservation et un paiement en ligne au préalable. Pour ces derniers, les transporteurs ont vite compris que leur clientèle n’était pas réellement comparable avec celles des VTC et ont donc décidé de vendre des titres ou des cartes prépayées chez des partenaires de proximité (bureaux de tabac, agences de voyage etc…).
Le e-commerce permet donc plus facilement l’exploration de nouveaux espaces stratégiques inexplorés.
Connaissez-vous le concept de l’"Océan bleu" ? C’est tout simplement une stratégie proposée par W. Chan Kim et Renée Mauborgne qui a pour objectif d'élargir en tant qu’entreprise son espace de développement d'activités sur des nouveaux champs encore inexplorés ou insuffisamment explorés. Mais avant d’atteindre cet océan de couleur bleue, il y a une phase plus ou moins longue nommée l'océan rouge qui elle représente la bataille concurrentielle sur des marchés existants.
Vous ne voyez toujours pas ? Revenons-en à la libéralisation des autocars longues distances non subventionnés. Pendant les premiers mois l’océan fut très rouge de sang des nombreux concurrents présents à l’époque ! Vous vous rappelez certainement, d’Eurolines, Isilines, Starshipper ou encore Mégabus. RIP, ils ont tous disparu.
Aujourd’hui l’océan est enfin bleu depuis quelques semaines, du fait qu’il n’en reste que deux : le géant Flixbus et BlaBlaBus anciennement Ouibus racheté récemment par BlaBlacar.
Les trottinettes électriques
Nous avons pris le parti pris de considérer qu'il y avait un e-commerce des services dédié à la mobilité et non de considérer cela comme un simple service de paiement en ligne.
Lancées en France l’année dernière, les trottinettes électriques en free-floating ont profité du boom du e-commerce des services de mobilité et ont envahi nos grandes villes et sont ainsi devenues le mode de transport à la mode !
Qu’on les aime ou qu’on ne les aime pas, aujourd’hui un grand nombre d’opérateurs se livrent une guerre sans merci où le sang de certains vient donc rougir tout un océan économique.
Il est fort probable que certains connaissent le même avenir radieux que Flixbus et Ouibus, mais cela risque de prendre du temps. Quoi, que… Tout va très vite… Il y a quelques jours, notre conclusion aurait été cela.
Aujourd’hui, on se rend compte que le marché se structure plus vite que prévu et seuls les géants comme Lime, Uber (Jump) ou encore Bird ont encore les moyens de combler les énormes pertes dû aux coûts astronomiques d’exploitation et des dégradations !
Paris où pas moins d’une dizaine d’opérateurs s’entretuaient jusqu’à la semaine dernière ; aujourd’hui la moitié ont quitté cet océan ou la guerre devenait bien trop sanglante.
En effet, depuis le début du mois de juillet, plusieurs opérateurs de trottinettes électriques en free-floating sur les douze que compte la capitale parisienne, ont décidé d’interrompre momentanément leur activité. On peut retrouver Bolt, Wind, Hive, Ufo, Tier et Voi, qui ne communiquent en aucun cas sur leur éventuel date de reprise.
Le 6 juin, Anne Hidalgo avait demandé aux acteurs :
de réduire leurs flottes
de brider les véhicules à 20km/h
interdiction de stationner sur tous les trottoirs
Mais ce qui a sans doute refroidi les ardeurs de ces jeunes entreprises est l'intention de la municipalité de limiter, à terme, « à deux ou trois le nombre d'opérateurs » présents à Paris, via un appel d'offres. Ceci explique surement le fait que certains opérateurs cessent leurs affaires un certain moment.
Le taux d'utilisation étant très faible, certains acteurs ont été contraints de retirer leurs véhicules.
Un grand nombre de trottinettes ne sont pas assez qualitatives et ne tiennent pas la route. Et encore nous ne parlons pas de celles qui sont dégradées par les utilisateurs ou volées. D'ailleurs, la durée de vie moyenne d'une trottinette est estimée à 3 mois. Toutefois, ce chiffre reste contredit par l'opérateur Wind qui possède un parc de trottinettes dont certaines sont sur la voirie depuis plus de 8/9 mois. Quoi qu'il arrive, la maintenance liée à ces dysfonctionnements et actes malveillants entraînent des coûts de réparations monstrueux.
Certains opérateurs attendent alors un cadre plus propice pour accueillir leurs véhicules. D’autres comptent bien revenir en force avec des trottinettes plus robustes, mieux équipées pour éviter toutes dégradations et pouvoir réagir plus vite aux éventuels réparations. Également, d’autres reverront éventuellement leurs services et leur offre sur l’application mobile. Chacun pourra appréhender le marché de la trottinette électrique de manière plus approfondie et avec une stratégie opérationnelle différente.
Actuellement le marché devient presque saturé et les start-up elles-même ne s’y retrouvent pas et ne voient la rentabilité derrière.
Nous pouvons donc nous poser la question suivante : l’océan bleu sera-t-il atteint bientôt ?
Comme c’est le cas à Paris, les trottinettes électriques ne sont pas tellement les bienvenues dans les agglomérations du monde entier. Très souvent critiquées pour leur sécurité ou leur encombrement sur nos trottoirs, elles divisent l'opinion publique et finalement sont-elles vouées à être rentables ?
Un océan bleu se doit d'être parfaitement maîtrisé et pour ce soit le cas il n'y a qu'un seul secret : la fidélisation !
Des opérateurs qui fidélisent leurs clients ?
En effet, avec des véhicules quasi similaires et des prix identiques, comptez 1€ le déblocage et 15 centime la minute, il n’est pas évident de se démarquer et pourtant les différentes marques ne mettent pas réellement en place d’offres de fidélité où d’offres d’abonnements pour faire baisser la facture.
De plus, avec un prix moyen des trottinettes individuelles très en baisse avec des géants asiatiques tels que Xiaomi qui propose des trottinettes à partir de 300€, si le consommateur régulier compare au prix de la location de trottinettes électrique, il y a un réel risque qui pèse chez ces prestataires de service de mobilité.
Et si finalement ces entreprises possédaient la formule magique ? Vous garder sans vous accompagner dans une fidélisation bilatérale... Cela vous parait fou ? Pas tout à fait !
“Le 12 septembre dernier, Jeff Bezos, le patron d'Amazon, a dû avoir un petit coup de blues. Ce jour-là, le brevet de l'une de ses innovations majeures - l'achat en un clic -, protégé depuis dix-sept ans, est tombé dans le domaine public. Or ce bouton magique, qui rend le shopping sur Internet si diaboliquement facile, a été l'un des principaux moteurs de la croissance turbo du numéro 1 mondial de l'e-commerce.” (https://www.capital.fr/entreprises-marches/e-commerce-attention-aux-pieges-de-lachat-en-1-clic-1285712)
On le sait désormais, cette fonctionnalité permet de doper les ventes. L’internaute n’a plus de temps à perdre et encore moins à remplir de nouveau des formulaires avec des informations qui vont lui paraître inutiles. Devoir recopier encore une fois ses coordonnées bancaires ? Même combat. Et si gagner ce temps là lui faisait comme par magie sauter la validation du panier qui peut laisser entrevoir entre autres le montant astronomique de la commande, notamment en cette période de soldes où l’accumulation de petites sommes se transforme rapidement en grosse somme…
L'enjeu du parcours client
Tentez d’utiliser une trottinette en free-floating et vous verrez que c’est un jeu d’enfant. Il vous suffira d’installer l’application et vous connecter directement via Facebook ou Google. Vous préférez rentrer vos coordonnées vous même ? On ne vous demandera qu’un numéro de téléphone ou une adresse mail et si vous le souhaitez vous pourrez personnaliser votre prénom maintenant ou plus tard. Mais à quoi cela sert de laisser son numéro de téléphone ou son adresse mail ? La question ne se pose même pas car on vous explique que c’est uniquement pour valider le code d’inscription assurant que c’est bien vous qui vous inscrivez ou que vous n’avez pas fait d’erreur lors de la saisie. Car après tout, l’erreur est humaine.
Rentrer ses coordonnées bancaires peut s’avérer tout une épreuve, vous pouvez directement scanner votre carte et l’appli fait le reste ou encore mieux pour certaines, y lier son compte ApplePay ou Google Pay directement avec son empreinte digitale ou faciale.
Cette simplicité lors de l’inscription garantit un excellent taux de complétion de formulaire qui est tout simplement le taux de remplissage des informations demandées. C’est imposé mais on approuve “car c’est pour la bonne cause” et surtout on va rapidement à l’essentiel !
Et le one click d’Amazon dans tout ça ?
Le business model du free-floating en général est très fort et possède les mêmes objectifs que l’innovation de Monsieur Bezos : vous faire consommer toujours plus sans que vous en ayez l’impression. En allant un peu plus loin : en y prenant même du plaisir… Oui vous savez, la fameuse “expérience client”...
On peut donc observer que ces entreprises pour la plupart des start-up fidélisent leurs clients sans forcément avoir de stratégies et encore moins d'accompagnement de la clientèle (formule d'abonnements, services annexes etc...).
Pendant tout votre parcours client, vous saurez en cherchant un peu le prix de la location, mais à aucun moment vous ne saurez combien va vous coûter votre trajet avant de l’effectuer et combien il vous coûte pendant que vous roulez. Puis c’est tellement agréable de rouler en trottinette qu’on en oublierait presque que le compteur est en train de tourner. C’est une fois votre trajet effectué que vous savez combien vous avez dépensé. Puis à 10€ de l’heure, les sommes sont souvent de quelques euros (estimées entre 2€ et 3€ selon Europe 1) vous poussant ainsi de nouveau à dépenser. Et comme nous l’illustre ce reportage M6, l’utiliser tous les jours et ainsi dépenser des petites sommes vous reviendrait tout de même à 3650€ par an...
Nous avons donc associé la mobilité au e-commerce :
Etes-vous d'accord avec notre approche ? Pensez-vous que l'océan bleu sera atteint rapidement ? Selon-vous que les marques de free-floating vont-elles devoir accompagner le client pour continuer à susciter de l'intérêt de sa part ?
Et l'accompagnement se caractérisait uniquement par le biais de nudges afin de ne pas faire investir davantage les marques qui peinent déjà à savoir dans combien de temps elles seront rentables (voire même si elles le seront un jour pour certaines)...
Voir l'article sur "Les nudges au service de la mobilité et de la planète".
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